Un nouvel article à paraître dans la revue Social Science and Medicinemontre un lien surprenant entre la douleur physique et l'état de l'économie. Selon les chercheurs, le niveau de douleur ressenti par lesindividus dans une société est corrélé au taux de chômage. De plus, l’augmentation des consultations pour douleur pendant un ralentissement économique concerne plus les femmes que les hommes.
« Plus d'un quart des citoyens du monde souffrent physiquement », déclarent les chercheurs, dirigés par Lucia Macchia de la Harvard Kennedy School. « C'est donc l'un des [phénomènes] les plus importants à comprendre. »
Les travaux de Macchia et de ses collègues suggèrent que la douleur physique est plus faible en période de boom et plus importante en période de ralentissement économique.
Pour tester cela, Macchia et son équipe ont utilisé les données du Gallup World Poll, une enquête qui contient des données de plus de 150 pays entre 2005 et 2018.
Ils ont constaté que la douleur physique auto-déclarée était plus élevée lorsque le taux de chômage était plus élevé et plus faible lorsque le taux de chômage était plus faible. Par ailleurs, cette relation est plus prononcée dans les pays riches ainsi que chez les femmes et les populations précaires.
On sait que la douleur n’a pas qu’une composante physique et somatique mais que l’environnement émotionnel et social joue un rôle majeur dans la perception de la douleur. Les femmes, particulièrement en période de crise, sont souvent les premières victimes du chômage, des pressions au travail et de l’accroissement de la charge mentale. De plus, les périodes de crise, comme celle de la COVID-19 par exemple, voient une augmentation des abus sexuels et des violences domestiques.
Les travailleurs précaires souffrent d’une plus grande exploitation, de blessures physiques, de consommation de stupéfiants et d’alcool, et d’une mauvaise alimentation. Une femme de ménage qui élève seule trois enfants aura plus de “chance” de se blesser le dos qu’un cadre de bureau.
Les auteurs pensent que leurs recherches mettent en évidence l'importance des facteurs psychologiques lorsqu'il s'agit de comprendre la douleur physique.
« Un moyen faisable, et peut-être plausible, de rendre compte des modèles de cette étude est qu'il existe un lien entre le stress mental et la douleur physique », déclarent les chercheurs. « Les êtres humains qui sont anxieux et soumis à une pression psychologique peuvent être intrinsèquement tendus et sensibles à la maladie, et ainsi ils peuvent signaler (et ressentir) une plus grande douleur physique. »